Bonsoir,
Merci pour ce site et merci à Pouhiou de l’avoir partagé !
J’ai moins une questions à te poser que des pistes à te demander pour me sortir d’une situation difficile.
Pour résumer. Je vais avoir 21 ans cette année. J’ai eu ma première fois à 19 ans et suis restée un ans et demi avec le gars en question (ah oui, je suis une fille, je sais pas si c’est important, mais autant le dire ^^), on s’est séparés en février. Il y a une raison particulière qui m’a poussée à le quitter : le viol. Ou du moins la tentative de viol. Je dormais et était véritablement épuisée par une journée d’animation qu’on avait faite pour Halloween et il a essayé de me pénétrer, je me suis réveillée avant qu’il y arrive, me suis retournée et ait essayé de me rendormir. C’est arrivé une fois auparavant à nouvel an mais j’avais réussi à me détendre pour que ça passe.
Mais cette dernière fois je m’étais rendue compte que c’était pas normal, que c’était pas ma faute si j’avais pas envie ce soir là et qui plus est, je dormais. Seulement, le mot ne voulait pas sortir. Pas viol, il ne pouvait pas me faire ça. Ca a continué jusqu’en janvier où j’ai tout lâché à une amie et où elle m’a dit que c’était du viol et que c’était innacceptable.
Après plusieurs semaines je me suis prise en main et en ai parlé au gars. Je croyais pouvoir lui pardonner mais non, je l’ai quitté deux jours plus tard (on était dans une relation à distance, on se voyait une fois par mois et cette rupture s’est faite par écrit, sur skype)
Après cette rupture j’ai repris le dessus, me sentais de mieux en mieux, ait retrouvé quelqu’un avec qui je sortais un peu et avait des relations sexuelles. Je prenais pas vraiment mon pied mais ça me faisait du bien un peu quand même.
Et puis, en mars, le garçon que j’avais quitté un mois auparavant s’est suicidé. Après l’enterrement, j’ai passé la nuit avec mon nouveau copain mais celui ci m’a abandonnée dès le lendemain. Il ne me répondait plus, ne me donnait plus de nouvelles, rien.
J’ai passé outre, j’avais d’autre souci et ai fait une croix sur ce gars.
Je devais aller à un concert avec un pote fraîchement rencontré et comme on avait des soucis pour le trajet on a décidé de prendre une chambre d’hôtel et comme on se connaissait depuis peu on voulait prendre un verre pour faire connaissance et puis il voulait me changer les idées (c’était 15 jours après le suicide de mon ex) Et on était pas du tout dans l’idée de se draguer ou quoi, je le trouvais mignon et je savais qu’il me trouvait mignonne aussi mais c’était la dernière de mes préoccupations à ce moment là.
Sauf que bah on se plaisait beaucoup et c’était une super soirée, ça a finit dans mon appart au pieux. Et là j’ai découvert que j’avais développé des réflexes d’autodéfense assez violents. Quand il me touchait que le plaisir commençait à monter je lui retirais sa main très vite et était globalement très tendue. Il s’en est rendu compte et on en a parlé, je lui ai dit ce qui s’était passé. Depuis ça va mieux. On travaille là dessus doucement pour que je reste calme et ne panique pas et ça va vraiment de mieux en mieux. Mais je voulais des pistes pour des tas de questions que je me pose encore.
Est ce qu’il y a des « trucs » pour m’aider doucement à reprendre le contrôle de mon corps ? Ou plutôt à pouvoir me laisser aller véritablement sans que j’ai à me concentrer sur le « panique pas, ça va, tu en as envie, il te fera pas de mal … »
Aussi, je suis incapable d’aller jusqu’à l’orgasme quand il me touche. J’en approche à chaque fois mais dès que je suis au bord de jouir il faut qu’il s’arrête tout de suite, je lui retire sa main et c’est à la fois beaucoup de plaisir cette sensation avant que je craque et très désagréable (j’ai pas plus précis comme terme). Je sais pas si c’est lié (je pense que si quand même un peu) mais pareil, une astuce/un conseil ?
Je me pose aussi beaucoup de questions quant à sont suicide et à la position que je dois avoir vis à vis des gens qui me posent des questions, mais là je pense que je déborde du cadre du site.
Mais ça m’arrive que des gens me demandent ce qui s’est passé et pourquoi j’ai quitté mon ex. Là je suis très partagée : en soi j’ai accepté ce qui m’est arrivé et on en a parlé et je comprends que ces gens veulent savoir parce que tous se demandent la raison de son suicide. Mais je refuse à chaque fois et sens très vite que je m’énerve quand on insiste sur le sujet (et je gère mal l’énervement, je pleure très vite, plus encore quand ça tourne autour de cette histoire) parce que je considère que c’est purement intime mais aussi, et c’est plus incidieux, parce que j’ai peur de la réaction des gens. J’ai peur qu’on me dise que c’est des conneries, que c’est pas possible (en plus, il a déjà été accusé de viol auparavant mais apparemment c’était du pipo de la part de la nana, j’avoue que depuis, j’ai des doutes. Mais bon il est plus là pour que je lui pose la question de toute façon). Et j’ai pas envie que les gens sachent et se souviennent de lui comme d’un violeur. Mon copain (celui du concert, donc ^^) m’a dit qu’il fallait que j’arrête de le protéger parce qu’il m’a agressée et abandonnée et que de toute façon y a plus rien à protéger. Et je suis d’accord.. Maaaais la question reste là et je voulais avoir un avis extérieur, si tu en as un ^^
Je suis toujours partagée entre le « je le déteste, il m’a fait du mal et m’a abandonnée » et le « pauvre gars j’aurai peut être du être plus patiente et lui signifier que c’était pas un monstre » et le « il est mort je veux me souvenir de lui pour ses bons côtés et pas le reste » (sauf qu’évidemment le reste influence beaucoup ma vie actuelle).
Voilà j’étais un peu longue mais l’insomnie et une crise de larme y a peu de temps me signalent que j’ai de toute façon besoin d’un peu d’aide, de pistes toussa toussa
Bonne soirée, bonne journée, bonne semaine (à moduler en fonction du moment où tu lis ça)
Et des bisous. J’aime bien les bisous.
Bonjour,
C’est effectivement une longue question, mais c’est (aussi) à ça que sert ce site.
Je voudrais commencer par te donner quelques ressources qui pourraient t’être utiles en tant que survivante d’un viol. Tu as apparemment eu plusieurs personnes qui t’ont écoutée avec bienveillance et c’est hyper important, mais peut-être que des personnes plus formées pourraient t’apporter d’autres choses. Tu peux notamment contacter le numéro vert pour mettre fin aux violences faites au femmes mis en place par le gouvernement au 3919 ou le collectif féministe contre le viol au 0 800 05 95 95 (attention si tu es travailleuse du sexe, voilée ou trans, l’accueil dans cette dernière pourrait laisser à désirer). Tu y trouveras des écoutant⋅e⋅s formé⋅e⋅s pour accueillir et orienter les personnes ayant subi des violences sexuelles, à qui tu pourras exposer ce qui t’est arrivé, tes ressentis, et éventuellement tes craintes et ton malaise. Il existe aussi ce site, pour lequel tu peux témoigner en écrivant à tanpmp@gmail.com, et sur lequel tu trouveras d’autres témoignages qui peuvent aussi t’aider.
[Edit] Sur Facebook, une personne m’a précisé : » Sur le blog Philomèle, il y a une liste de psy formé⋅e⋅s au psychotrauma https://philomeleblog.wordpress.com/2014/10/01/comprendre-le-ptsd-apres-un-viol/ (majoritairement parisienne malheureusement) »
Ensuite en ce qui te concerne, c’est une situation extrêmement difficile et je n’oserais pas dire que « je comprends » parce que clairement, je n’ai aucune idée de ce que je ferais « à ta place ». Il y a cependant plusieurs choses que je peux te dire.
La première, c’est que TU N’ES PAS RESPONSABLE DU SUICIDE TON VIOLEUR. Je suis désolée de le mettre en capslock, c’est pas pour crier, hein, mais c’est important que tu le lises, vraiment. Tu as le droit d’être en colère et tu as le droit de le détester pour ce qu’il t’a fait. Tu as le droit de te souvenir de lui « comme d’un violeur » puisque c’est ce qu’il était. Il était sans doute plein d’autres choses, mais pour toi, il était un violeur, ton violeur. Alors non, ça ne signifie pas qu’il était un « monstre », juste un être humain, un être humain qui a (plusieurs fois) nié ton consentement. Mais voilà, ta « détestation » est légitime : il t’a fait du mal. Paradoxalement, ça n’empêche pas d’avoir de la peine pour lui, d’être triste qu’il en soit arrivé à cette extrémité. La reconnaissance de la souffrance qu’il t’a infligée peut tout à fait coexister avec la compassion que tu sembles éprouver. Mais n’oublie pas que rien dans TON comportement n’est ou n’a été problématique, tu t’es contentée de lui parler du mal qu’il t’avait fait et de mettre fin à votre relation, ce qui est juste logique et ni méchant ni cruel.
Tu n’as de comptes à rendre à personne sur ton ressenti à l’égard de ce garçon. Pas à ton copain, qui voulait sans doute bien faire en te disant d' »[arrêter] de le protéger », ni à qui que ce soit d’autre qui pourrait désapprouver le fait que tu t’en souviennes « comme d’un violeur ». Ca ne regarde que toi, et tu es la seule à pouvoir savoir si ce dilemme t’est trop pénible. Après, le fait que tu parles d' »insomnie » et de « crise de larme » me laisse penser que c’est une situation qui te pèse pas mal sur le plan moral, et pour laquelle tu pourrais peut-être bénéficier de l’aide d’un⋅e professionnel⋅le de santé. Un⋅e professionnel⋅le de la santé formé⋅e à l’accompagnement psychologique pourrait sans doute t’aider à faire la paix avec toi là-dessus, à faire cohabiter tes sentiments partagés et paradoxaux, voire à atténuer ceux qui te tourmentent le plus.
Pour ce qui est de tes blocages sexuels (difficulté à « lâcher prise », peur voire angoisse, arrêts brusques dès que tu ressens du plaisir), ils sont très probablement liés (au moins en partie) au trauma consécutif au⋅x viol⋅s. Il peut même s’agir de ce que l’on appelle le syndrome de stress post traumatique. C’est très courant après des violences, notamment sexuelles mais pas que, et sur ce points là aussi, l’aide d’un⋅e professionnel⋅le de santé type formé⋅e à l’accompagnement psychologique (ou d’un groupe de parole spécialisé, les assos dont je t’ai mis les contacts plus haut pourront t’aider à trouver ce qui te convient le mieux) peut être précieuse. N’oublie pas que tu as le droit de ne pas avoir envie de faire du sexe. Le droit d’avoir envie d’arrêter à n’importe quel moment. Et que tes partenaires ont pour leur part le devoir de te foutre la paix si tu n’as pas envie du tout, et de s’arrêter dès que tu leur demande.
Je ne sais pas dans quelle mesure cette réponse t’aidera, mais un petit peu j’espère.
Je t’envoie des bisous parce que tu as raison, les bisous c’est bien, et puis je rajoute une couche de courage et une autre de câlins si tu veux bien.
Cette réponse existe grâce au soutien de @abompard sur Tipeee. Merci beaucoup!
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