Bonjour,
Merci pour ce site, je viens de parcourir les réponses et j’ai encore des questions !
En couple (hétéro) depuis quelque mois avec un homme plus âgé que moi, j’ai du mal à parler de notre sexualité avec lui. J’adore faire l’amour et me considère assez ouverte à ce niveau. Sauf qu’il y a pour moi quelque soucis, d’une part il a souvent envie mais a des difficultés à bander ou tenir une érection, et invoque la fatigue. Je sens que cela le frustre énormément et le blesse dans sa « virilité ». (Oui c’est son côté matcho, on fait avec). Du coup, les préliminaires sont souvent passés à la trappe, ce qui me frustre un peu. Mais surtout il a une manière très tendre de faire l’amour, ce qui est très nouveau pour moi et agréable. Sauf que malgré mes revendications féministes, j’aime beaucoup quand c’est un peu brutal et rapide. J’ai mis trois semaines à lui avouer que j’adorais la fessée. Et là j’avoue que je bloque. Je ne sais pas comment lui parler de mes envies… Il m’a demandé si je trouvais qu’il faisait l’amour comme une fille et du coup
j’ai très peur de le blesser en lui parlant de mes envies. Il est assez sensible sur ce sujet. Voila du coup, comment on dit à un matcho qu’on aime que c’est pas parce qu’il bande pas comme un taureau qu’on aime pas faire l’amour avec lui et qu’on adorerait qu’il nous maltraite un peu plus en terme de pénétration… ?
Merci d’avance,
A bientôt,
Bonjour bonjour,
Ahhhh… L’éternelle obsession des mecs cis pour leur pénis -sa taille, sa rigidité, sa vie, son œuvre…- en voilà une question intéressante mais pas simple! Il faut dire, pour leur défense, que TOUT est fait pour qu’on associe le phallus à la puissance et à la virilité et, comme toutes les idées ou habitudes construites depuis le berceau, ça prend du temps (plein) et de l’énergie (beaucoup) pour les détricoter. Si tu ajoutes à ça qu’on n’apprend pas vraiment aux meufs à exprimer leurs envies ni aux mecs à leur demander, forcément ça ne facilite pas la communication sur le sujet :)
En ce qui concerne ta question, j’en vois en fait deux : comment faire comprendre à un mec que son érection n’est pas le centre du monde, ni même de la sexualité qu’on partage? et comment parler de ses envies à une personne à l’égo fragile sans qu’elle le prenne comme une attaque ou un reproche?
Chapitre 1: Comment aider son/sa partenaire qui rencontre des difficultés d’érection et semble en souffrir?
Il n’y a pas vraiment une solution miracle qui permettrait de faire disparaître magiquement l’angoisse de performance et/ou de virilité liée aux « pannes ». Qui plus est, c’est un peu un cercle vicieux : plus on y pense, plus ça nous stresse, plus il y a de chances que ça arrive, ce qui nous rend plus tendu·e pour la fois suivante et la tension étant l’ennemie de l’érection, tu vois le truc. Ce n’est pas une fatalité pour autant, et il y a des astuces qui peuvent aider pour décentrer l’attention du pénis et de sa levée (ou non).
Un truc qui peut fonctionner est de lui lancer un défi (à la personne, pas au pénis, hein) pour que la prochaine fois que vous ferez du sexe, cela se déroule sans pénétration avec son pénis (pour cet exemple, disons que la fellation ne compte pas comme une pénétration, puisque c’est souvent une pénétration « passive », c’est la bouche qui vient s’emboîter sur le pénis). Tu peux le présenter comme un jeu, un challenge, une envie de ta part; prétexter avoir lu à propos de cette expérience ou en avoir entendu parler (dans les médias, par un·e ami·e…). Le principal c’est d’en faire une expérience ludique et sans prise de tête. Débarrassé·e de la pression à bander, on peut consacrer plus d’énergie à penser à son plaisir et celui de son/sa/ses partenaire·s, prendre son temps pour faire exactement ce dont on a envie tou·te·s les deux (ou plus!). Cela pourrait aussi vous aider à retrouver le chemin de ce que tu appelles « préliminaires », nom un peu fourre-tout (sans mauvais jeu de mots #winkwink) que la plupart des gen·te·s utilisent pour parler de… Tout sauf la pénétration vaginale ou anale avec un pénis! Les baisers, les massages, les caresses, la masturbation mutuelle, le cunnilingus, la fellation, il y a l’embarras du choix pour se faire plaisir (on peut aussi utiliser un sextoy ensemble en plus, par exemple un vibro, un plug anal…)! Si ça vous plait, vous pouvez recommencer aussi souvent que vous en avez envie et ça pourrait aider ton partenaire à réaliser que NON, son pénis en érection n’est absolument pas nécessaire pour t’exciter et/ou te donner du plaisir.
En sexologie, le concept de « stimulation sensorielle non génitale » est un peu similaire, au moins dans ses objectifs, puisqu’il s’agit de changer la focalisation, pour passer d’une sexualité concentrée sur les parties géni(t)ales (hihi) à une sexualité qui prend en compte l’ensemble du corps. Donc l’idée c’est de se toucher, de se caresser, de se mordre, de se frotter, de se pincer, bref, d’être en contact sensuel/sensoriel mais sans utiliser ou entrer en contact avec son pénis et/ou sa vulve. Ça peut se passer de différentes manières, par exemple on peut fixer des étapes progressives, se programmer des sessions… Cette méthode permet de se reconnecter avec ses sensations en dehors de toute urgence ou pression liée au « fonctionnement » des organes génitaux, et ça peut aider autant les personnes qui ont des difficultés à bander que celles qui souffrent de vaginisme, par exemple, ou encore d e soucis d’éjaculation (trop rapide, trop lente…).
Chapitre 2: Comment demander à son partenaire d’être plus « brutal » sans inquiéter sa masculinité?
Là-dessus, je tiens quand même à dire (parce que certaines de tes formulations pourraient laisser penser le contraire) que tu n’es responsable ni de son érection (ou absence d’érection) ni de son rapport avec son identité de genre ou sa sexualité. Il apparaît effectivement assez clairement que ton ami a des insécurités par rapport à ça, mais tu es sa partenaire, pas sa thérapeute.
Alors oui, tu peux éviter de lui faire des remarques désobligeantes, montrer que tu ne te sens pas « visée » par ses pannes et que tu as envie de faire du sexe avec lui tout entier, pas seulement avec son pénis. Mais de là à savoir quoi lui répondre lorsqu »il te demande s’il fait l’amour comme une fille… Le seul truc que je vois c’est de lui renvoyer la balle et d’interroger ses représentations : ça veut dire quoi, pour lui, « faire l’amour comme une fille »? Être sensuel·le, doux·ce, passif·ve, pénétré·e? Tout ça c’est des constructions culturelles et sociales. Toutes les femmes ne rêvent pas de faire l’amour lentement dans des draps de satin en écoutant du piano (la preuve, toi tu aimerais que ça soit plus animal, plus brusque même si j’ai bien compris). Et tous les hommes ne souhaitent pas avoir une sexualité qui se résume à attraper leur partenaire contre un mur et jouir en 5 minutes. Donc « faire l’amour comme une fille », ça ne veut pas dire grand chose, au final… Je ne sais pas si ça va le tranquilliser dans sa « virilité » mais j’ai pas mieux, là ^^
Quant à la façon de présenter tes envies, je pense que l’honnêteté et la franchise c’est plutôt un bon pari. Or, d’après ce que je comprends, tu n’as pas forcément de problème avec le fait qu’il soit tendre, tu dis même que c’est « très agréable ». Donc l’idée ne serait pas de lui demander d’arrêter de se montrer doux, mais peut-être plutôt de varier, d’alterner avec des moments de sexualité plus brutaux et rapides, donc (au passage, ce n’est pas du tout incompatible avec tes revendications féministes d’aimer le sexe un peu animal ou sauvage). Je ne sais pas comment tu as abordé le truc pour lui parler des fessées, mais il est sans doute possible de t’y prendre de la même manière si ça a fonctionné? Lui dire simplement « tu sais, j’aimerais bien essayer [insère ici une pratique dont tu as envie], est-ce que ça te dirait? » par exemple, ça peut fonctionner. Le truc, c’est qu’il faudrait peut-être que arrives avant à réfléchir à ce que tu veux exactement pour pouvoir lui en parler. Est-ce que tu as envie qu’il t’attrape par la gorge? Qu’il t’empoigne les cheveux? Qu’il te morde? Qu’il te pénètre avec euh… énergie (dans ce cas, ça peut tout à fait être avec un/des doigt·s, voire une main ou un sextoy si son pénis n’est pas toujours opé… D’ailleurs, c’est beaucoup plus facile d’orienter une main ou un objet que l’on tient qu’une bite, ça peut permettre d’atteindre des zones de plaisir peu ou pas explorées jusqu’alors – genre le fameux point G ^^ )?
GIF par l’incroyablement talentueuse Elodie Petit <3
Plus tu seras précise dans tes envies, plus il y a de chances qu’il te comprenne correctement et que vous preniez beaucoup de plaisir ensemble! Attention cependant : ce n’est pas parce que tu demandes/proposes un truc sexuel qu’il est obligé d’en avoir envie lui aussi, et si jamais ce n’est pas du tout le cas, il est important de l’accepter sans insister (insister, ça devient vite du harcèlement et ça c’est pas cool). Il est aussi possible qu’il soit un peu tenté mais pas sûr de comment s’y prendre etc, dans ce cas vous pouvez penser ensemble à des idées : ateliers sexo, livres ou films pornos et/ou éducatifs mettant en scène les pratiques qui t’excitent… Vous pouvez apprendre ensemble :)
Voilà voilà, j’espère que tu trouveras des pistes à explorer là dedans,
Bisettes à lunettes!
Cette réponse existe grâce au soutien de @Arjuna_Corax sur Tipeee. Merci beaucoup!